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Entretien

En quelques lignes, comment résumeriez-vous votre livre ?

C'est un livre sur les compagnies de création théâtrale et sur les lieux théâtraux. Un livre qui nous fait voyager vers ces villes et ces régions du Québec, d'Acadie et du Canada français, où des théâtres ont été aménagés, rénovés voire construits par des compagnies de théâtre dont le mandat est la création dramatique et l'innovation théâtrale. Un livre qui nous entraîne sur plus d'un demi-siècle et qui raconte la fondation d'une quarantaine de compagnies, leurs errances d'une salle à l'autre, leur choix et leur aménagement d'un théâtre, leurs directions artistiques successives et la consolidation de leur mandat à titre de théâtres de création. C'est un livre du voyage. Le road book du théâtre.

Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire cet ouvrage et à le publier ?

Surtout le fait que l'histoire du théâtre créé au Québec, en Acadie et au Canada français est le plus souvent écrite et analysée à partir des seules œuvres dramatiques. Le théâtre est étudié du point de vue de la dramaturgie, du texte. La part des auteurs dramatiques y est immense. Mais qu'en est-il des lieux où ces textes sont créés, des contextes, du travail des metteurs en scène, des scénographes, des comédiens et, surtout, du travail des directeurs et des directrices artistiques des compagnies ? Quel est donc ce paysage dans lequel les textes écrits par les auteurs arrivent à l'existence ?

Qu'en est-il des compagnies et des théâtres d'Acadie et du Canada français ?

Franco-ontarienne de naissance et de formation, je suis profondément marquée par les trente années que j'ai passées à Ottawa, dans ce contexte culturel et linguistique minoritaire, et je suis toujours fascinée par la résistance et la résilience de ces artistes dont l'œuvre est si profondément attachée à des paysages qui sont différents de ceux du Québec et qui demeurent essentiels. Et puis, depuis les cinq dernières années, les spectacles créés par toutes les compagnies partent en tournée sur les routes du Québec, de l'Acadie et du Canada français. Les rencontres se multiplient et enrichissent nos imaginaires.

Nous vous connaissons surtout comme spécialiste du théâtre jeune public et de la pédagogie artistique.

Comment en êtes-vous venue à écrire ce livre de synthèse sur l'histoire du théâtre ?Je me suis intéressée au théâtre jeunes publics et à la pédagogie du théâtre à mon arrivée à Montréal en 1975. Ce milieu était alors très vibrant, et les créations tout à fait novatrices. Mais avant, soit de 1964 à 1975, je m'étais surtout intéressée au théâtre de création à titre de praticienne, d'historienne et de critique de théâtre. C'est donc au tournant du siècle (le XXIe) que je suis revenue à mes premières amours et que j'ai entrepris des collaborations avec des collègues amis : Joël Beddows, Bernard Lavoie, Gilbert David et Yves Raymond.

À votre avis, à qui votre livre s'adresse-t-il ?

Aux spectateurs et aux artistes qui s'intéressent à l'histoire et à la situation actuelle du théâtre au Québec, en Acadie et au Canada français. À celles et à ceux qui se posent la question de l'origine et de l'évolution des compagnies et des théâtres et qui veulent savoir pourquoi nos théâtres sont construits dans des casernes de pompiers, des synagogues, des cinémas et des écoles.
Aux professeurs et aux étudiants des écoles de formation professionnelle, des universités et des cégeps qui veulent mieux connaître ces compagnies qu'ils apprécient, qui seront leurs employeurs et collaborateurs, et ces lieux qu'ils trouvent confortables, étonnants ou alors tout à fait minables. Aux voyageurs d'ici et d'ailleurs qui souhaiteraient aller à la rencontre du théâtre là où il a lieu, là où il est créé et produit. Quelle belle idée que de traverser le Québec et le Canada en ayant comme points de chute ces lieux où rencontrer des auteurs, des comédiens, des metteurs en scène, des scénographes ou voir du théâtre professionnel de création.

En quoi se distingue-t-il si on le compare à d'autres livres traitant du même sujet ?

Aucun autre livre ne considère ainsi l'histoire et la situation actuelle du théâtre de création à partir des compagnies et des lieux où ce théâtre est produit. Aucun autre livre n'associe d'aussi près la création dramatique au travail des compagnies et à la description physique des lieux où elles travaillent. D'autres livres s'intéressent aux auteurs dramatiques et à leurs œuvres. D'autres livres encore s'arrêtent à certains genres ou à certaines époques. Mais aucun, jusqu'à présent, n'avait pris le parti de voir l'art du théâtre sous cet angle.

Quels sont vos rituels d'écriture ?

Je m'entoure de photos, d'images, d'éléments visuels quand j'écris à propos d'une compagnie, d'un théâtre, d'un spectacle ou d'un artiste. J'y trouve des atmosphères, des indices, des émotions, et même des sons et des musiques. J'écris dans le silence. Je lis des romans et de la poésie au moment où j'écris pour que ces écritures de fiction nourrissent mon écriture d'analyse.

Quels sont les écrivains et les œuvres qui vous ont le plus marqué ?

Le sociologue Jean Duvignaud, l'essayiste Bernard Dort que j'ai eu comme professeur à l'Institut d'études théâtrales (Paris) ; les romancières Clarice Lispector, pour l'envoûtement, Gabrielle Roy, qui porte l'ensemble du Canada français dans son œuvre, et Margaret Atwood, née à Ottawa, qui me parle directement de ce que je suis ; les poètes Pierre Perrault pour ses images et Gaston Miron pour sa voix. Et parce que, pendant deux heures, à la pluie battante, debout à l'angle des rues Nicholas et Laurier, à Ottawa, il m'a dit, de sa forte voix, ceux de ses poèmes les plus engagés et les plus beaux.

Qu'est-ce qui vous passionne ?

La vie qui se renouvelle sans cesse. Les feuilles des arbres qui réapparaissent chaque printemps ; les plantes vivaces qui sortent de terre et déploient leurs couleurs ; la toute petite graine qui donne une citrouille. Et tous ces êtres qui, malgré leurs souffrances, conservent au fond des yeux une grande lumière.

Quels sont vos projets à venir ?

Vivre.

Avez-vous une adresse électronique où vos lecteurs peuvent vous écrire ?

beauchamp.helene@uqam.ca

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